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Lettres simiesques à l’Illustre Professeur Flapi (3 & 4)

Documents.

par Professeur Bonobo.

Disponible en librairie : Alertez les bébés ! (Objections aux progrès de l’eugénisme et de l’artificialisation de l’espèce humaine). Voir ici

Rappel. La publication en novembre 2022 d’un ouvrage collectif intitulé Les enfants de la Machine (revue Écologie & Politique, éditions Le Bord de l’eau), et consacré à l’eugénisme technologique, suscite l’ire « antifasciste » du Professeur Flapi (« Professeur de philosophie sociale et politique, de philosophie des sciences, de sustainability studies, etc. ». ), qui crépite des mois durant de vitupérations prolixes, et jusque sur un site « des écologies ». Un site « inclusif » donc, à l’exclusion des critiques de l’eugénisme technologique.
C’est que pour le Professeur Flapi et pour ses pareils flapistes, l’artificialisation de la production infantile, son industrialisation, sa marchandisation et l’amélioration génétique de l’espèce sous maîtrise scientifique, n’ont rien que de « progressiste » et d’« égalitaire ». Simplement, les biocrates seront plus égaux que les autres.
Le Professeur Bonobo, cible principale et récurrente de ces diatribes « antifascistes », et pourtant le plus doux des hominidés, finit par s’émouvoir de propos assimilant le tableau d’une maternité à une photo de la marche sur Rome (1922). Où le « fascisme » et l’« antifascisme » ne vont-ils pas se nicher ? Il nous a donc mandé quelques épîtres en réponse à son collègue, et nous qui avons contribué aux Enfants de la Machine, et qui sommes donc non moins coupables, nous n’avons pu faire moins que de les publier. En voici, suivant la coutume des revues universitaires, quelques « mots clés » :

Procréation Technologiquement Assistée (PTA). Eugénisme et positions féministes. Féminisme matérialiste, féminisme postmoderne et transhumain. Complicité des technolâtres néomarxistes et postmodernes. Volonté de puissance et démesure technologique. Orlan, Preciado, et Donna Haraway. Écoféminisme et féminisme postmoderne. Anthropes et cybernanthropes. Phénoménologie matérielle de la chair vivante selon Michel Henry. Ce qu’anti-techno-capitaliste veut dire.

Lire aussi  : Lettres simiesques à l’Illustre Professeur Flapi (1 & 2)

Jack Kerouac & Romain Gary – Notre Bibliothèque Verte n° 55 et 56

Documents

par Renaud Garcia

Disponible en librairie : Notre Bibliothèque Verte (deux volumes). Voir ici

On aurait difficilement pu trouver deux auteurs mieux assortis pour ces diptyques de Notre Bibliothèque Verte que Jack Kerouac et Romain Gary. Deux hommes d’un même temps – Gary (1914-1980) naissant avant et mourant après Kerouac (1922-1969). Deux fils à leurs mamans, irrémédiablement liés à leurs mères ; deux fils de leurs mères, spirituellement et physiquement, Kerouac ne pouvant se résoudre à vivre ailleurs que chez Mémère ; Gary, incurable orphelin à 30 ans, ne vivant que pour accomplir les rêves mis en lui par sa mère. Les fils et les mères nous comprendront (les fils aînés surtout, les vrais fils).
Ces deux fils sont par ailleurs deux ingénus, d’une ingénuité à fondre en larmes, et à rire aux éclats parfois. Deux inadaptés mystiques et picaresques se fourrant dans des milieux et des aventures incongrus, d’une sensibilité jumelle et superlative qui en aurait fait de bien meilleurs compagnons de route que ceux qu’ils côtoyèrent – mais ils se succédèrent à Big Sur sans s’y croiser. Solitaires au fond, pudiques, secrets, odieux, égoïstes (des fils à leurs mamans), souvent hâbleurs (« mythomanes »), d’une noblesse, d’une délicatesse et d’une générosité incompréhensibles, insoupçonnables au commun de leurs congénères. Ce n’est pas facile d’être Kerouac ou Gary. On en bave. On paye cher.

Nos deux amis des bêtes, des chats, des éléphants, et même des hommes (libres dans une nature libre), ont bien des tares en commun. On a gardé la pire pour la fin : ils sont français et ils n’ont même pas honte ! Gary, ce juif de Lituanie, né Kacew, dans l’empire tsariste, est français par sa mère, par l’amour de sa mère pour le pays de la liberté, pour sa langue, ses livres, son histoire. Étonnez-vous que le chevalier Gary rejoigne Saint-Exupéry, dans l’aviation de la France libre.
Si Gary parle français dès l’âge de 14 ans (cours particuliers, installation à Nice), Jean-Louis Le Bris de Kerouac, dit Ti-Jean, dit Jack, ne parle que français jusqu’au même âge. Le français de Lowell, Massachusetts – sa langue maternelle broyée depuis 200 ans dans les gosiers du Québec et celui de Mémère la Catholique. Un « patois canuck infantile » qu’il écrit toujours à l’oreille en 1951 : « J’ai pas aimé ma vie. C’est pas la faute à personne, c’ainque moi. Je voué ainque la tristesse tout partout. Bien des foi quand y’a bien du monde qui ri moi j’wé pas rien droll » (La Nuit Est Ma Femme). « Sé dur pour mué parle l’Angla parse je toujours parle le Francas Canadien chenou dans ti-Canada » (La vie est d’hommage).
Il fait d’ailleurs, quatre ans avant sa mort, une virée éthylique à Paris et en Bretagne, sur les traces de ses aïeux, errance pathétique bâclée dans le pathétique Satori à Paris. Il est très dur de considérer que Kerouac ne s’est pas suicidé, comme Gary, mais à coups de bouteilles plutôt que de pistolet.
Vous voulez savoir ce qu’était « l’exception française » ? Voyez Gary, voyez Kerouac et quelques autres.

Lire aussi :
 George Byron et Mary Shelley – Notre Bibliothèque Verte n°41 & 42
 Vladimir Arseniev et Georges Condominas – Notre Bibliothèque Verte n°43 & 44
 Pierre de Ronsard & William Blake – Notre Bibliothèque Verte n°45 & 46
 Philip K. Dick & Richard Fleischer – Notre Bibliothèque Verte n°47 & 48
 Clifford D. Simak & Pierre Boulle – Notre Bibliothèque Verte n°49 & 50
 Jean-Jacques Rousseau & Bernardin de Saint-Pierre – Notre Bibliothèque Verte n° 51 et 52
 Les Shadoks & Nino Ferrer – Notre Bibliothèque Verte n° 53 et 54

« Complotisme » et « écoterrorisme » : deux enfumages de la technocratie dirigeante

Documents.

par Pièces et main d’œuvre.

Toujours en librairie : Terreur et Possession. Enquête sur la police des populations à l’ère technologique et A la recherche du nouvel ennemi. 2001-2025 : rudiments d’histoire contemporaine. Voir ici.

« Complotistes » (alias « conspirationnistes »), et « écoterroristes » figurent parmi les pires méchants de l’heure, en compagnie des « populistes », des « radicalisés », et de toute la séquelle des « phobes » – des « transphobes » aux « islamophobes » .
Vous pouvez vérifier sur Gougueule : « Complotisme », 16 pages de références. « Écoterrorisme », également 16 pages (« Afin d’afficher les résultats les plus pertinents, nous avons omis quelques entrées qui sont très similaires aux 157 entrées actuelles »). 16 pages, 157 entrées, à multiplier par des dizaines de livres et des milliers d’unités de bruit médiatique. « Un mensonge répété mille fois se transforme en vérité » (punchline attribuée à Joseph Goebbels, le communiquant d’Hitler).
Le renouveau de cette « menace complotiste » (après le 11 septembre, l’assassinat de Kennedy, etc.), est évidemment concomitant de l’épidémie de Covid-19, quand partout dans le monde de simples Terriens (et même des scientifiques), s’avisèrent de discuter l’explication officielle de l’origine du virus (chauve-souris + pangolin + marché populaire de Wuhan) ; de critiquer les mesures dictatoriales prises pour le combattre (conseil de défense, assignation de populations à résidence, interdiction de soins des médecins généralistes, obligation vaccinale, etc.) ; voire, de dénoncer l’emballement techno-totalitaire qui s’engouffrait dans l’occasion (télétravail, télé-enseignement, QR-codes…). Les curieux peuvent lire Le règne machinal (la crise sanitaire et au-delà) (ici), une enquête qui a dit sur le vif ce qu’il y avait à dire là-dessus, à telle enseigne que paraissent avec plus ou moins de retard des hommages plus ou moins appuyés, du copiage littéral au pastiche sournois. Ainsi va le ruissellement des idées.
(…)

Lire aussi :
 L’invention de la « théorie du complot »
 A la recherche du nouvel ennemi (I) – Rufin, Mandraud et les polices contre « l’écoterrorisme »
 A propos de l’action armée dans les métropoles

Saint-Simon, l’ingénieur-prêcheur de l’industrialisme – Bleue comme une orange, chap.15

Documents.

par TomJo & Marius Blouin

En librairie : De la technocratie. La classe puissante à l’ère technologique, par Marius Blouin. Voir ici.

Le Français Henri de Saint-Simon (1760-1825), venu des marais picards – aux confins de ces vastes et vagues Pays-Bas, s’étalant et se retirant suivant les siècles entre l’Authie et la Mer du Nord, et de l’Atlantique à l’Allemagne – est le prophète exalté de ce que l’économiste Adolphe Blanqui a nommé « la révolution industrielle » (1837). Ayant découvert sur place l’esprit d’entreprise des Anglo – et DutchAmerican ; étudié les mathématiques et l’ingénierie à l’école de Mézières – future Polytechnique ; visité les canaux, réseaux, digues et polders néerlandais ; gagné et perdu une fortune en spéculations foncières sous la Révolution ; il entame à près de quarante ans une carrière « scientifique » – ou se voulant telle.

Un ingénieur qui se pique de penser ne fait jamais que de l’ingénierie. De l’analogie entre les réseaux physiologiques, économiques, sociaux, géographiques, etc., Saint-Simon tire des projets de transformation du monde sous la direction rationnelle des scientifiques. Disciples et descendants de Saint-Simon, conscients ou inconscients, prolifèrent du XIXe siècle au XXIe, en France et ailleurs, quitte à changer le nom de sa doctrine – l’industrialisme – pour celui de leur variante particulière (positivisme, socialisme scientifique, cybernétique, etc.). Leur triomphe est, a posteriori, tout sauf une surprise. Il est celui d’une classe, la technocratie (Smyth, 1919), à la fois produit et productrice de technologies (Bigelow, 1829), au sens nouveau et américain d’applications industrielles de la science (technosciences), et dont les technologistes de toutes sortes fournissent l’idéologie. Cette idéologie culmine aujourd’hui dans le transhumanisme (Huxley, 1957), dont les Pays-Bas constituent l’un des centres les plus avancés. Mais on y revient.

Chapitres 1 à 3.
Chapitres 4 et 5.
Chapitre 6.
Chapitre 7.
Chapitre 8.
Chapitre 9.
Chapitre 10.
Chapitre 11.
Chapitre 12.
Chapitre 13.
Chapitre 14.

Lettres simiesques à l’Illustre Professeur Flapi

Documents.

par Professeur Bonobo.

Disponible en librairie : Alertez les bébés ! (Objections aux progrès de l’eugénisme et de l’artificialisation de l’espèce humaine). Voir ici

La publication en novembre 2022 d’un ouvrage collectif intitulé Les enfants de la Machine (revue Écologie & Politique, éditions Le Bord de l’eau), et consacré à l’eugénisme technologique, suscite l’ire du Professeur Flapi et de sa faction flapiste. Celle-ci, depuis des mois, harcelait les maîtres d’œuvre d’incessantes diatribes électroniques, avant d’épandre son courroux – fiel, sottises et calomnies compris – sur un site extra-terrestre. L’ouvrage, épuisé déjà chez l’éditeur, reste en vente dans quelques librairies où nos lecteurs ont encore une chance de le trouver. Les auteurs et éditeurs apprécieront ce succès en connaisseurs.
Le conflit éclate lors d’un congrès de futurologie dont nous n’avons trouvé ni le lieu, ni la date, ni les actes, mais la littérature connaît des précédents. Voyez Les Call-girls de Arthur Koestler (1972, Calmann-Lévy), qui rapporte un colloque de scientifiques (les « call-girls »), dans un chic village des Alpes, afin de chercher (en vain) les moyens de prévenir la destruction de l’espèce humaine, rendue possible – probable, inévitable – grâce aux percées de la science.

Le Professeur Flapi n’est pas un ouistiti. Voyez sa carte de visite : « Professeur de philosophie sociale et politique, de philosophie des sciences, de sustainability studies, etc. ». Tout cela à la Haute École d’Extractivisme – et soyez sûr qu’il montera encore plus haut. C’est une sommité, une éminence, que ce Flapi, il lui suffit de trouver l’arbre le plus vert, le plus élevé, pour se hisser, tel une liane à la cime de la canopée, en étreignant très fort le tronc.
Quant au professeur Bonobo, principale cible de ses invectives, ah… ce n’est pas de la même branche. Manque d’ambition. Prof de province. Un peu miteux. Enfin. Ayant pris un hiver de repos, il s’est pourtant résigné à répondre à Flapi, par pure confraternité. Ça se fait entre collègues universitaires. Question de probité, déontologie, etc. Et nous qui avons contribué aux Enfants de la Machine, et qui sommes donc également coupables, nous ne pouvons faire moins que de publier ces lettres du Professeur Bonobo au Professeur Flapi.

Nucléaire : l’impasse de la puiscience

Nécrotechnologies.

par Pièces et main d’œuvre.

Voici un an, le 10 février 2022, le président Macron annonçait un programme d’emballement nucléaire sans précédent depuis 1974, sous les gouvernements de Pompidou et Giscard d’Estaing. Depuis un an, nous tâchons avec nos amis de raviver la contestation anti-nucléaire qui fut – depuis l’après-guerre – la matrice de l’écologie radicale, mais cela ne plait pas à tout le monde.
Notre ami Jean Degoche nous aime bien, mais il nous a envoyé une lettre navrée. Il réprouve notre « fixette sur le nucléaire ». Bien sûr, lui aussi, dans sa jeunesse, a collé sur son combi VW le joli soleil dans la fleur de tournesol avec l’inscription « nucléaire non merci ». Et convenons que c’était un engagement hardi, même s’il n’est pas allé plus loin. Cela reste entre nous, mais jamais, depuis des décennies, nous ne l’avons vu dans les réunions et manifestations anti-industrielles. Il ne peut pas. Il veut « socialiser les industries de l’énergie », y compris l’industrie nucléaire qu’il s’agit de « se réapproprier ».
En fait, il s’inquiète terriblement pour Camille, son enfant trans, et pour « toustes ses ami-es » des Jeunesses Greta (« iel » est en « mutation » comme dit Preciado, mais nous ne savons pas de quoi vers quoi…. Une morille radioactive peut-être ? mais « sentiente »). Nous allons tous mourir grillés par ce joli soleil « antinucléaire », bien avant de mourir irradiés, et c’est un peu votre faute à vous, les écologistes radicaux, nous dit notre ami Jean.
Bref, c’est malheureux, mais il n’y a plus de retour en arrière possible. Les déchets sont là. Il faut bien en faire quelque chose ; à Bure, La Hague, ou ailleurs. Les générations futures (Camille et ses co-morilles), subissent déjà la cuisson climatique, leur problème est comment la réduire (le nucléaire), et se procurer des THS (traitement hormonaux de substitution) (voir l’article de Chloé, de l’UCL Grenoble, dans le n°334 d’Alternative libertaire, janvier 2023) Mais qui sait ? Peut-être que les effets mutagènes et tératogènes des rayonnements radioactifs, que l’on observe déjà à Tchernobyl et ailleurs, permettront aux morilles de faire d’une pierre, deux coups ; et de s’épanouir dans le nouveau corps correspondant depuis toujours à leur ressenti.

En attendant, nous avons tenté de répondre ici aux remontrances de Jean, et d’éclairer un peu les rapports entre le nucléaire et la volonté de puiscience – d’agir sur le monde et nous-mêmes comme maîtres et possesseurs.

Lire aussi :

 Gravelines, Chooz, Plogoff, Golfech… Tu te souviens des luttes antinucléaires ?
 De Messmer à Macron, le discours du nucléaire
 Françoise d’Eaubonne à Grenoble
 Mémento Malville

Écouter aussi : « Malville », épisode 7 du podcast « Face au monde-machine »

Chercheurs de poux

Nécrotechnologies.

par Walter Minator.

On disait jadis « tuer une mouche avec un marteau-pilon », ou « tuez-les tous, dieu reconnaîtra les siens ! » On dira bientôt « tuer les poux avec les pouilleux », voire « avec tous et toutes ».
Vous ne saviez rien de la mortelle menace que représentent les poux pour l’humanité et pour l’ensemble de la nature ? Qu’à cela ne tienne, une équipe de chercheurs (« brillants », « éminents », choisissez vous-même) lance l’alerte et de nouveaux poisons sur le marché. Voilà qui va radicalement abréger la monumentale nomenclature de 4000 pages établie par Jean-Henri Fabre (1823-1915) dans ses Souvenirs entomologiques (1).
On sait depuis plus d’un demi-siècle que les efforts combinés de la science, de l’industrie et du commerce, aboutissent à l’épandage dans le milieu d’une multitude d’insecticides et d’herbicides, qui, de proche en proche, se transforment en écocides et homicides (voir Murray Bookchin, Notre environnement synthétique – juin 1962 et Rachel Carson, Printemps silencieux – septembre 1962). C’est pourquoi Jean-Pierre Berlan, chercheur à l’INRA, avait proposé, voici vingt ans de cela de substituer au terme de « biotechnologies » – technologies du vivant – celui de « nécrotechnologies » – technologies de mort (2). Que voulez-vous, il faut bien penser à nos cancers et à ceux des générations futures. Notre ami Walter Minator, lui-même chercheur et membre de notre conseil scientifique, y pense très fort. D’où cette note qu’il nous a envoyée et qui a été validée par le comité de lecture de notre prestigieuse revue.

Notes
(1) J.-H. Fabre, Souvenirs entomologiques, 2 volumes, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2000
(2) « Quelques termes de la novlangue biotechnologique » in La guerre au vivant, Agone, 2001

Futura Gaïa : Les in(sou)tenables promesses de la FoodTech

Nécrotechnologies.

par Le Platane.

Connaissez-vous la FoodTech ? Rien d’original dans ce néologisme, modelé sur FinTech, EdTech, DeepTech, etc., pour décrire l’élimination des humains dans un secteur d’activité, au profit des machines et de leurs concepteurs. Le ministre de l’agriculture Julien Denormandie nous l’explique : « Cette troisième révolution agricole, elle est très simple à comprendre, elle est fondée sur trois choses : le numérique, la robotique et la génétique. » (France Info TV, 14/10/21)

Pour produire la techno-pâtée des Smartiens, plus besoin de paysans, de soleil ni de sols. C’est ce que prétend la start-up Futura Gaïa installée dans le sud de la France, et que critiquent nos amis arboricoles et marseillais du Platane. Ces jeunes gens refusent les salades de la Tech, quelque chose a dû planter dans leur programmation. Voyons ce qui leur coupe l’appétit.

Lire aussi : Démonter le monde-machine

Jean-Jacques Rousseau & Bernardin de Saint-Pierre – Notre Bibliothèque Verte n° 51 et 52

Documents

par Renaud Garcia

Disponible en librairie : Notre Bibliothèque Verte (deux volumes). Voir ici

11 juillet 1768. Rousseau (1712-1778) arrive à Grenoble où il reste moins d’un mois dans un méchant garni de la rue qui porte aujourd’hui son nom. Il a 56 ans. Il est célèbre et traqué par les puissances intellectuelles, politiques et religieuses de son temps – églises catholique et protestantes, parlement de Paris, facultés de théologie, Conseil de Genève, États des Pays-Bas, et même, par le clan « philosophique ».
On brûle ses livres, on veut l’embastiller. C’est en réfugié et marchant sous la pluie depuis la Grande Chartreuse, par des chemins boueux, qu’il atteint le quartier Saint-Laurent où il va d’abord se sécher à l’auberge. Faut-il qu’il ait dit quelque chose de vrai pour provoquer de telles vindictes.

Son dessein est alors de se terrer sous un faux nom (« Renou ») dans un village autour de Grenoble et de se livrer à l’herboristerie pour le reste de ses jours. Mais Rousseau est également une « star », une « idole » de l’opéra (Le Devin du village, 1752), et du roman (La Nouvelle Héloïse, 1761), protégé par de grands seigneurs et des bourgeois « éclairés » qui l’ont recommandé par courrier à leurs correspondants grenoblois, avec de multiples consignes.

Toute la population de Grenoble (25 000 habitants) sait aussitôt que Renou/Rousseau est dans ses murs. Toute la noblesse (« la très très bonne société »), tous les magistrats, les avocats, les négociants (« la bonne société »), toutes leurs dames, en proie à la rousseaumania, veulent le recevoir ou le rencontrer. Ses promenades à pied, au-delà de La Tronche ou jusqu’à Eybens, tournent à la marche triomphale, avec des foules rangées sur les bas-côtés pour le voir passer « sans le reconnaître », et des va-et-vient de carrosses qui le frôlent, pleins de curieux.
Qui pis est, son hôte, l’avocat Gaspard Bovier (1732-1806), lui-même « rousseauiste » et qui baigne son jeune fils à l’eau froide – d’après L’Émile (1762) – est un crampon qui le surveille sans doute pour le compte de la police de Paris, autant qu’il tâche de l’aider dans ses projets d’installation. Les autorités royales ne veulent pas la mort de Rousseau, mais son silence et son assignation à domicile. L’avocat Bovier ne peut trop se faire valoir auprès de ses relations de sa proximité avec Rousseau. Celui-ci a refusé de loger chez l’avocat, mais il ne peut couper à la journée de pique-nique à la Bastille, avec femmes, enfants, valets, etc., dont les Grenopolitains d’aujourd’hui liront avec délice le récit dans Jean-Jacques Rousseau à Grenoble, journal de l’avocat Bovier (PUG).

Rousseau, flanqué de l’indécollable Bovier, herborise et visite des maisons à louer, à Tavernolles, aux Angonnes, et surtout à Beauregard, sur le flanc du Vercors, aujourd’hui connu comme « le Désert de Jean-Jacques Rousseau », dessous la Tour-sans-venin, à Seyssinet-Pariset. Il doit rendre et subir des visites très formelles, des mondanités qu’il abhorre, l’hommage d’une chorale de jeunes gens venue chanter Le Devin du village sous sa fenêtre. L’amitié qu’il noue avec d’autres botanistes ne peut compenser les harcèlements des importuns, des gêneurs, d’un escroc. Il s’enfuit sans crier gare pour Bourgoin où l’attend sa compagne Thérèse Levasseur (1721-1801), qu’il épouse civilement le 30 juillet. En route vers de nouvelles tribulations.

Rousseau était-il « rousseauiste » ? Bien des gens en ont douté, et lui-même, peut-être, le premier. L’ancêtre de tous les beatnicks, bien avant Ti-Jean Le Bris de Kerouac (1922-1969), chemineau solitaire voué à la marche et à l’introspection compulsive, se savait bien trop contradictoire dans ses raisonnements pour se croire l’auteur d’une doctrine fixée qui aurait mis fin à ses vagabondages mentaux. A sa délicieuse liberté de penser et d’errer. D’être au monde comme un poisson dans l’océan de l’existence.
Quel serait le contenu figé de ce rousseauisme introuvable ? Quelle de ses idées n’a-t-il pas réfutée par une autre ? Par une rêverie, une impulsion contraire ? Par ses actes ? A rendre fous les rousseaulogues, mais aussi à leur fournir un emploi à vie.
Que si par rousseauisme on entend l’exaltation libertaire de la nature, l’exaltation de la nature dans ce qu’elle a de libertaire, d’invinciblement vivant, mouvant, émouvant, on comprend alors que le rousseauisme soit en quelque sorte un contre-produit de la « révolution industrielle » dont il est l’exact contemporain. Que ce mot serve d’insulte depuis deux siècles à tous les ennemis de la nature et d’enseigne à nombre de ses amis, tel Zisly, l’anarchiste naturien de la fin du XIXe, reconnaissant en Rousseau un « individualiste libertaire ».

Kerouac – autre « individualiste libertaire » s’il en fut -, partageait avec Rousseau cette effusion mystique de l’homme dans la nature. Voyez ses récits de Big Sur, de l’automne en Californie, de ses errances en forêt et en montagne, de la vie sur les chemins (« la révolution des sacs à dos »). Mais toujours il revenait à mémère (sa mère), comme Rousseau revenait à Thérèse, sa compagne. Parmi leurs autres coïncidences, l’absence de fibre paternelle est la plus moche. Rousseau abandonne cinq enfants ; Kerouac, une fille. Cela se fait beaucoup du temps de Rousseau (voyez Elisabeth Badinter, L’amour en plus. Histoire de l’amour maternel), beaucoup moins du temps de Kerouac.
Nos deux individualistes partagent en outre le même goût de la musique (jazz, opéra), la même horreur du vedettariat, la même timidité farouche, la même défiance vis-à-vis des cliques « branchées » (« philosophes » et « beatnicks »), la même répulsion des suiveurs (« hippies » et « gens de lettres »), la même fin solitaire.

Quant à l’invention du « rousseauisme », au sens le plus niaisement lacrymal, il semble qu’on la doive plutôt à Bernardin de Saint-Pierre (1737-1814), paradoxal compagnon de promenade du « promeneur solitaire », qui publie en 1788, vingt-sept ans après La Nouvelle Héloïse, une « pastorale » larmoyante intitulée Paul et Virginie, et best-seller instantané. Mais tous les premiers romantiques ont le goût des larmes. On ne sait ce que Rousseau en aurait pensé, il était mort depuis dix ans. Lisons donc les notices que Renaud Garcia consacre à ces deux chantres de l’Eden primitif.

Lire aussi :
 George Byron et Mary Shelley – Notre Bibliothèque Verte n°41 & 42
 Vladimir Arseniev et Georges Condominas – Notre Bibliothèque Verte n°43 & 44
 Pierre de Ronsard & William Blake – Notre Bibliothèque Verte n°45 & 46
 Philip K. Dick & Richard Fleischer – Notre Bibliothèque Verte n°47 & 48
 Clifford D. Simak & Pierre Boulle – Notre Bibliothèque Verte n°49 & 50

Gravelines, Chooz, Plogoff, Golfech… Tu te souviens des luttes antinucléaires ?

Nécrotechnologies.

par Pièces et main d’œuvre.

La première génération « écolo » surgie au début des années 1970 ne marchait pas seulement « contre les énergies carbonées », mais contre le nucléaire et la société de consommation. Quels naïfs ces boumeurs, dont certains persistent aujourd’hui à contester l’électro-nucléaire et son monde ; voitures, vélos et trottinettes électro-nucléaires ; chauffage et cuisinières électro-nucléaires ; ordis, smartphones et réseaux électro-nucléaires ; usines, transports, société électro-nucléaires – c’est-à-dire policière, radioactive et à la merci de la caste des nucléocrates, pour aussi longtemps que dureront les déchets nucléaires.

Si vous souhaitez découvrir ces temps primitifs de l’écologie anti-nucléaire, lisez le dossier de vingt pages publié par La Décroissance dans son numéro double actuellement en vente (n°195, décembre 2022/janvier 2023, 32 p. 5€50). Plein d’excellents articles par d’excellents auteurs sur l’histoire et l’actualité du nucléaire et de sa contestation – mais nous sommes juges et parties (voir le sommaire ci-après).
Si vous répugnez à payer pour vous salir les doigts sur du papier imprimé, et à contribuer ainsi à la déforestation et aux nuisances de l’industrie papetière, vous pouvez lire ces quelques souvenirs et propos de certains « qui y étaient », parmi des dizaines de milliers d’autres. Alain, Jean-Luc, Gilles, Corine, Laurent, Jean-Michel et Claude, tous passés par Gravelines, Chooz, Plogoff, Golfech.
Nous, on s’en fiche, on publie autant sur papier qu’en ligne (livres, brochures, journaux), et on ne se fait jamais payer. Ni en ligne, ni sur papier. Ni même pour les causeries « en présentiel », quand on ne se fait pas « annuler » par des transhumanistes « inclusifs ». On devrait peut-être y renoncer. Les déplacements en TGV électro-nucléaire, mine de rien, ça aggrave notre empreinte écologique et notre bilan carbone.

Merci à Charles et à Tomjo qui sont allés boire des coups pour entendre de leurs propres oreilles ces bribes de témoignages ; à Gilles et à Claude pour les courriers qu’ils nous ont envoyés. Il y aurait une bibliographie monumentale du mouvement anti-nucléaire à établir, avec des milliers de titres. Il y aurait un dictionnaire monumental du mouvement écologiste et anti-industriel (« naturien »), à établir, avec des milliers de noms. Des volontaires derrière leurs écrans ?

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